Tendances

La place informationnelle suisse, un de nos avenirs possibles

Les substantifs qualité, rigueur, fiabilité, neutralité s’associent souvent à la Confédération Helvétique, ses produits ou ses habitants. Heureux hasard, les valeurs fondamentales de la déontologie journalistique et des médias sont identiques, et s’appliquent de plus en plus à toute la chaîne de valeur.
Dans une vision à moyen et long terme, la Suisse pourrait miser sur ses avantages pour développer la place informationnelle suisse dans la lignée du développement de notre place financière au XIX-XXe siècles. Encore analysé depuis un angle territorial, voire linguistique, le terrain de jeux des médias d’aujourd’hui et de demain est la planète entière, le même donc que celui de toutes les autres « commodités mondialisées ». L’information journalistique, dont la qualité et la pertinence est garantie par le respect de règles morales communes à toute une profession, devient toujours plus importante pour tous les secteurs de la société et impose progressivement ses principes déontologiques à toute la chaîne de valeur, du stockage à la diffusion, et à toutes les formes d’informations, de la donnée statistique aux contenus de fiction.

En croissance perpétuelle, ce nouveau marché informationnel « régulé » induira d’immenses besoins, où les principaux critères de pertinence des offres seront autant physiques (position stratégique, permanence de l’alimentation électrique), que sécuritaires (autoriser les accès uniquement aux ayants droit tout en permettant diverses formes d’anonymat) ou relatives à la neutralité (confidentialité, garantie de la permanence de la prestation, quels que soient les aléas de toutes natures). Autant de domaines où la Suisse peut faire la différence avec ses caractéristiques physiques (bunker, hydroélectricité) et politiques (neutralité, stabilité). En effet, avec ses atouts historiques, son personnel qualifié, sa population multilingue/multiculturelle, ses infrastructures à très haut débit, la Suisse pourrait devenir le centre de la future Europe informationnelle.

En ces temps troublés par la crise et l’arrivée fracassante de la troisième révolution industrielle, nos secteurs tertiaires traditionnels peinent à trouver une réponse économique et morale satisfaisante. Doit-on réellement baser notre prospérité future sur la confiscation de revenus fiscaux d’autres nations, sur l’exportation d’armes de guerre ou sur la spéculation sur les matières premières qui nourrissent l’humanité? Est-ce que ces leviers de croissance du XXe siècle renforcent notre position en tant que leader du multilatéralisme, de l’accueil des organisations internationales en terrain neutre ou de la diffusion de nos progrès intellectuels sous forme de brevets, machines et autres savoir-faire? Alors que la réponse paraît moralement évidente, la crainte économique empêche de finaliser la réflexion, de mettre en cohérence la présence sur notre territoire de l’ONU ou de l’OMS avec des revenus directement liés à la persistance des problèmes que ces organisations tentent de résoudre.

La Suisse, nation physique et idée politique, a les moyens de lier le développement continu de sa prospérité avec l’assurance que celle-ci n’appauvrit personne. Pour le moment. Mais aussi pour garantir son propre avenir. S’il n’est pas le dernier siècle de l’histoire, le XXIe siècle fonctionnera dans une perspective plus transparente et plus partagée, en phase avec l’évolution latérale de l’économie distribuée. En ce sens, toutes les pistes de croissances économiques non-destructrices doivent être étudiées. Et les premiers arrivés seront les premiers servis.
Parmi les avenirs possibles : une place informationnelle suisse qui valide la déontologie des données et les conserve pour des millénaires de manière sécurisée dans nos bunkers physiques, légaux et informationnels ; mais aussi une place informationnelle qui valorise et étend les compétences helvétiques historiques, tout en les intégrant dans un cadre – fréquent pour le journaliste – mais assez nouveau pour l’industrie d’exportation : la déontologie.

Clément Charles
ATC Future Medias

clement@cominmag.ch

http://www.toutlecontenu.com/

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